Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'élégancedeslivres
17 octobre 2023

Le Livre de la rentrée Luc Chomarat Éditions La Manufacture de livres

Le livre de la rentrée - broché - Luc Chomarat - Achat Livre ou ebook | fnac

Le Livre de la rentrée

Luc Chomarat

Éditions La Manufacture de livres

Le livre de la rentrée - broché - Luc Chomarat - Achat Livre ou ebook | fnac

Mon avis :

« Le Livre de la rentrée », et c’est peu dire. Un feu d’artifice littéraire.

Pétillant, subtil, raffiné, ce livre est une délectation. La vigueur d’un langage de virtuosité. Tant de malice, d’intelligence aiguë, dans une douceur telle, que l’on ouvre toutes les fenêtres de ce livre singulier, l’avant-garde du génie.

Sous ses faux airs de clown au nez rouge, s’élève une histoire aux multiples signaux. La caricature de nos idiosyncrasies, et c’est drôlement bien mené.

Sociologique, engagé, sociétal, les degrés sont l’acuité, l’éveil de nos fantasmes et désirs.

Les diktats, les arrières-pensées, les courants de mode, les habitus sont distillés. D’aucuns trouveront l’évocation de leurs petites habitudes et manies.

Ce livre est fascinant de justesse. Le regard d’aigle d’un auteur : Luc Chomarat qui observe, jongle, glisse entre les lignes, nos travers, notre conformisme, sans être critique, l’humour souverain et la pertinence époustouflante.

« - Les hommes médiocres et violents ne sont pas à fuir parce qu’ils sont des hommes, mais parce qu’ils sont médiocres et violents, non ? Et même chose pour les femmes, non ? ».

L’histoire est audacieuse et pointe du doigt là où ça fait mal. Bien au-delà, le charme des sentiments, le macrocosme de l’identité. Les rôles inversés, comme une prise de pouvoir sur l’autre. Car oui, l’auteur plonge dans le récit et ses brasses sont des rires, des clins d’œil. Des myriades de surprises qui frôlent nos convictions et nos partis pris. Ce livre est profondément humain et acclame la quête de soi. L’envol d’une création littéraire, gémellaire avec « Delafeuille » personnage central de ce livre.

L’enjeu pour ce dernier, éditeur soumis aux pressions éditoriales de sa hiérarchie. Il se doit de trouver le manuscrit qui sera remarqué, en haut du podium. Il prend acte du manuscrit de son ami devenu, Luc qu’il a déjà édité. Tourmenté, quelque peu fragilisé par cette quête du Graal, le défi pour lui. Il va se rendre dans le Sud-Ouest en bord de mer pour quelques jours chez Luc. Ce dernier vit dans une agréable maison, avec sa femme Delphine, leur fils et le chien Pablo, si, si. Parisiens parachutés, dans l’ère post-Covid, en plein air. Jogging pour lui et écriture, pour Delphine, le quotidien basique d’une femme au foyer. Pas un faux-pli, pas une poussière ne sont ignorés. Elle est belle, envoûtante, magnétique. Il est misogyne, bobo, lisse et son égo est surdimensionné. Delafeuille se fait discret. Il observe ce couple avec enfant, imagine un roman, sauf que.

Les conversations sont des leviers, des prises de risques. Chacun reste sur sa position. Un chat reste un chat. Le manuscrit va être semeur de zizanie. La fiction et le réel s’enlacent. Delafeuille et Delphine deviennent des protagonistes. Mais la vie, la vraie est dans l’éclat de la nouveauté. Delafeuille ressent des sentiments pour Delphine. Luc fond les décors. Attise la transmutation. Les pions avancent. Rien ne s’échappe. Delafeuille fait plusieurs séjours chez Luc. Comme un escompte hyperbolique du futur.

« - Et puis, ils me font marrer, tes collègues. Leur soi-disant respect des minorités. Il n’y a pas plus raciste qu’un éditeur parisien. Pourquoi crois-tu que, pour eux, « la blanche » est supérieure à « la noire » ?. Delafeuille sourit. -Je crois que tu vas un peu loin ? -Parce que tu penses comme eux. Tu es comme eux. Tu es l’un d’eux. L’éditeur ne releva pas. Raoul était un bon gars. Il fallait juste laisser glisser »... « À Paris on peut tomber amoureux tous les jours ».

Romantique, sensible, Delafeuille est dans une solennité amoureuse. Il ne dit rien. Delphine reste dans son rôle de femme soumise, effacée, à distance de ce qui pourrait faire trembler les murs de son antre. « Elle était vraiment leur mère à tous. C’était paradoxal. Elle ressemblait à un dessin de Kiraz. Pas à une madone à l’enfant ».

Luc reste constant dans sa toute puissance bourgeoise et désagréable. « -Je vais te filer mes vieilles Asics. Maintenant je porte des Brooks. J’ai franchi un pas important. -On n’a vraiment pas les mêmes problèmes ».

« Le Livre de la rentrée » est une mise en abîme psychologique des errances des rapports humains. « Sommes-nous ce que nous sommes ? ». Délicieusement politique et satirique. La traversée du miroir des existences inachevées en quête initiatique. Qui de la fiction ou du réel ?« Le Livre de la rentrée » est un pied de nez au monde éditorial. C’est un livre au fond, d’une gravité spectaculaire. Mais « Le Livre de la rentrée » n’est pas toujours celui que l’on croit, mais celui-ci. Apprendre à se méfier comme le disait Prosper Mérimée.

Une madeleine de Proust. Publié par les majeures Éditions La Manufacture de livres.

Publicité
Publicité
Commentaires
L'élégancedeslivres
Publicité
Archives
Publicité