La boîte à écriture Milorad Pavic Traduit du serbe par Maria Bejanovska Éditions Le Nouvel Attila
La boîte à écriture
Milorad Pavic
Traduit du serbe par Maria Bejavska
Éditions Le Nouvel Attila
« Chaque fois que l’Europe tombe malade, elle cherche à soigner les Balkans. » « La boîte à écriture » est un objet-livre magistral. Un phénomène éditorial, une chance inouïe. L’ouvrir délicatement, l’heure est certifiée. C’est une boîte parabolique, essentialiste, si, si. « Tout porte à croire qu’elle avait servi à la famille Dabinovic de Dobrota de petite boîte marine avant de se retrouver dans un vieux palais de Kotor… -Car, si tu découvres le secret, tu deviens partie de ce secret. » « La boîte à écriture » est en plusieurs parties. Les tiroirs s’ouvrent sur des récits, beaux à couper le souffle. « Le couvercle avec le soleil en laiton, Les 48 cartes postales, Le niveau médian, etc. » Milorad Pavić donne la main au narrateur. Ecoutez cette voix onirique entre Paris et Kodor. La mer adriatique révèle ce qui s’est passé. Attendez juste un peu, j’ouvre « Le manuscrit de Paris enveloppé dans une bande dessinée anglaise ». « Qui es-tu ? me demanda-t-elle brusquement ? -Trouve la réponse toi-même. Un vieux secret permet à chacun de se voir, soi-même, ou l’autre, comme dans un miroir si son regard est celui d’un miroir. » Ce texte est un aimant. Comment décrire ce révélé qui frémit ? Entre le mystique, le conte, la quintessence. Cette gravité d’une trame qui sera le marqueur pour demain encore. « Elle ouvrait la porte endormie, avec un regard à briser les miroirs. » « La boîte à écriture » est Babel, le chant des langues, le soldat serbe qui veut oublier sa langue maternelle. L’écriture est macrocosme. Chaque tiroir dûment décrit laisse les histoires s’envoler. Ouvrez vos mains ailes de papillons, prenez les chemins labyrinthiques, cette boîte est de loin le plus grand mystère intérieur qui se dévoile subrepticement. Relisez plusieurs fois ce grand livre d’un auteur que j’aurai aimé rencontrer en vérité. Sa voix est là, encense les découvertes dans cette boîte qui palpite et dont l’écho est là encore à l’heure où j’écris. « Sur la terre, le livre saint du ciel est divulgué et interprété par les Tsiganes qui lisent dans les cartes du Tarot que l’on ne comprendra jamais si on ignore que chacune d’elles est un ensemble d’étoiles sur la carte d’Hermès. » « Le compartiment 10 pour les objets précieux » est le cœur de la boîte. Laissez venir à vous ce tragique, cette beauté d’un texte qui délivre la forêt de ses pièges. Qui apporte cette grâce d’une rédemption à la douleur infinie. « Comment oublier rapidement et facilement la langue seule. » Litanie, prière épiphanie, l’épars égaré dans les limbes. J’en tremble encore tant elle m’a initiée. « Je ne sais pas si tu sais que les forêts déménagent. Quand elles se mettent en route, elles voyagent lentement et longtemps à la recherche d’un meilleur endroit. Elles partent le plus souvent en automne. Comme les oiseaux. Ou comme les hommes. » « La boîte à écriture » est sceau. « Ici, il suffit de tendre la main pour que la nuit tombe sur ta paume dit-il. » Milorad Pavić (1928-2009) dont « Le dictionnaire Khazar » a été traduit en 26 langues, nous guide ici entre le réel, l’imaginaire, le mystique, le rêve, l’étrange, l’homme vrai, celui qui ne sait plus, ne veut plus être le soldat serbe. Le mot de passe enfouit dans la boîte marine, invisible, fantôme universel est la magnificence de cette boîte que je vous invite tous à étreindre. Traduit du serbe par Maria Bejanovska, Les majeures Éditions Le Nouvel Attila viennent de publier le plus bel objet-livre du monde et c’est peu dire.